« Un week-end naturiste m’a rendu ma liberté. Fils unique, je suis né et j’ai grandi à Marseille dans une famille très pudique. Petit, je me sens différent des autres. Je n’ai pas les mêmes goûts ni les mêmes centres d’intérêt que les enfants de mon âge.
Très tôt, je réalise que je suis attiré par les garçons. Je garde cette attirance secrète mais il y a tout de même les moqueries, les regards durs. Je le vis comme une injustice et j’ai du mal à entrer dans le moule, à respecter les règles.
À cette époque, les seuls moments où je me sens vraiment heureux, c’est pendant les vacances d’été, vêtu d’un simple maillot de bain. La nuit aussi quand, vers 10-11 ans, je décide de dormir nu. Ce sont des moments où je me sens moi-même.
À 23 ans, je réussis enfin à me confier à mes parents. Ils accueillent bien mon homosexualité et c’est libérateur. Je pense que ma vie peut enfin commencer. Rapidement je rencontre mon compagnon et je construis ma vie professionnelle à ses côtés. Je travaille dans une boutique de prêt-à-porter homme pendant 16 ans. Tout va bien en apparence mais un malaise subsiste. Je ne me sens pas à ma place dans le milieu de la mode et à 39 ans j’entreprends une reconversion en tant qu’aide-soignant. Un métier dont j’ai toujours rêvé. Je trouve un emploi dans un EHPAD. Mais c’est un choc. Je suis déçu de la façon dont on traite les patients et les soignants. La souffrance des personnes âgées est trop dure à supporter. Ce métier ne m’épanouit pas et la déception est grande. Je me retrouve à 40 ans dans une grande instabilité morale et financière. C’est au cours de ce passage à vide que je commence à me renseigner sur le naturisme. Je débute l’expérience par un week-end dans un domaine naturiste. Arrivé sur place, je me dénude très naturellement à l’entrée et un sentiment de plénitude totale m’envahit. Je me libère du regard de la société, du jugement, de ce que les vêtements disent de moi. Je me sens totalement libre. C’est une révélation. Quitter le domaine est un crève-cœur et je décide qu’à partir de ce jour-là je vivrais nu, de janvier à décembre, de 8h à minuit.
Je trouve dans le naturisme une philosophie et un art de vivre libérateurs. Nus, on est tous les mêmes. Le vêtement est un masque derrière lequel on se cache. Quand on l’enlève, les barrières sociales et morales tombent. On accepte qui l’on est fondamentalement. Je comprends finalement qui je suis et ce que je veux. Je retrouve un travail dans l’administration qui m’épanouit totalement et commence à militer dans une association naturiste que j’ai créée. Vivre nu dès que je peux m’a libéré. À 45 ans, je réussis enfin à vivre ma vie sans souffrance, ni douleur. C’est une sensation magique. »
Propos recueillis par Virginie d’Humières