Agathe Giros : « Passer à côté de sa vie… » – Nuit des Idées, la Sorbonne-

« Qu’est-ce que vraiment le risque personnel ? Pour moi c’est de passer à côté de sa vie. Et de qui on est. »

Agathe Giros entourée de Marie-Amélie Lefur et d’Olivier Reynaud.

Agathe Giros, la fondatrice et Ceo de The Editorialist,  a participé à la deuxième table ronde animée et proposée par les Déviations le 23 mars dernier à la Nuit des Idées à la Sorbonne.  – Voir aussi le témoignage très inspirant de Marie-Amélie Le fur, présidente du Comité Paralympique Sportif Français-

Voici l’intégralité de son intervention passionnante : 

‘”Je suis ravie d’être là. Je suis venue à la création entrepreneuriale il y a six ans. Cela a commencé par un blog. J’ai dirigé une galerie d’art, j’ai travaillé dans la finance, dans les médias. Dans la finance, le côté artistique me manquait beaucoup. J’ai lancé un blog sur l’art et la politique où j’ai rencontré des artistes contemporains et des gens qui pensaient à des nouveaux modèles de société qui faisaient écho à des réflexions personnelles que j’avais sur ces sujets. Ce blog a été remarqué par Arte et par la direction du groupe Orange qui m’a contactée : « on veut créer un média sur la culture, est-ce que vous voulez bien le faire ? Je me suis dit : » chouette ! Bingo » De là est née du coup mon envie d’entreprendre qui s’accompagnait d’un désir personnel de liberté, d’être beaucoup plus libre que dans un cadre de salariat qui ne me correspondait pas forcément.

«J’ai créé l’entreprise que j’avais dans le ventre »

J’ai créé à partir de cette expérience, The Editorialist. Nous sommes une trentaine de personnes à Paris, on travaille avec un réseau de 200 journalistes spécialisés à travers le monde. Notre mission c’est de raconter et d’accélérer les transformations positives des entreprises. Concrètement, on produit des articles, des décryptages sectoriels pour comprendre le monde économique et ce qui s’y joue. Notre monde change sous plein d’aspects et notamment sur le monde économique. Ce que je trouve un peu effarant, c’est l’absence de connaissances globales dans ce qui se joue dans les entreprises. On les connait mal. Il s’y joue plein de choses hyper transformantes en ce moment. Cela m’intéressait de les raconter et de les documenter. Je sens que j’ai créé l’entreprise que j’avais dans le ventre pour reprendre une expression chère à Michèle Penka. Cela a été difficile, car ce que j’ai trouvé complexe, était de savoir dans quelle boussole interne je devais me mettre. Il n’y a pas de fierté d’être entrepreneur, c’est un métier parmi mille autres. Pour me motiver, je me suis appuyée sur la liberté. Et cela a été très important pour moi pour trouver ce cap.

“Des codes qui ne m’appartenaient pas »

Les pires moments dans ma création entrepreneuriale ont été quand j’ai perdu ce cap en essayant de m’inscrire dans un modèle dominant. J’ai de nombreux amis qui montaient des startups. Il  fallait soit lever des fonds soit avoir un produit tech. Mon modèle, c’est un atelier, une salle de rédaction, un média. A un moment je me suis dit : « c’est la catastrophe, je n’ai pas de produit, pas d’investisseurs, je ne suis pas en train de créer une vraie boite. » C’était très compliqué. J’étais dans des codes qui ne m’appartenaient pas. Ce qui compte, du coup, c’est d’ancrer sereinement ce qui nous motive et ensuite de tenir ce cap. Je ne dis pas qu’après tout est facile, mais tout fait sens et justifie les efforts qu’on y met. C’est quelque chose que l’on ressent aussi assez physiquement.

« La créativité naît de la contrainte »

J’ai dû enlever une doudoune très confortable. Je gagnais très bien ma vie. La créativité naît de la contrainte. La contrainte financière est une contrainte parmi d’autres. Il y a des contextes qui complexifient beaucoup l’accès à certains métiers, c’est plus difficile quand on vient de certains milieux. A l’inverse des éducations, des milieux ou des réalités économiques sont souvent perçus comme extrêmement angoissants alors que cela n’est pas du tout le cas.

Avant de me lancer, quand j’ai enlevé ma doudoune et que j’étais hyper stressée, tout un tas de gens me disait : « mais tu es cinglée, tu es dans un fond d’investissement, tout le monde veut faire ce que tu fais, il y a la crise. » J’avais fini par me dire que cela n’avait pas de sens. Ce n’est pas çà le risque. Devant le Jardin des Tuileries à Paris, il y a des plaques commémoratives de jeunes âgés de 18, 23 ans qui ont perdu la vie pendant la deuxième guerre mondiale parce qu’ils s’étaient engagés pour suivre des idéaux. C’est ça le risque, c’est ça le courage. Il y a un moment aussi où  nous devons enlever nos doudounes. Qu’est-ce que vraiment le risque personnel ? Pour moi c’est de passer à côté de sa vie. Et de qui on est. Il faut aussi savoir remettre à leur juste place les risques que l’on prend dans certaines aventures professionnelles.

« Nous sommes tous capables du meilleur comme du pire »

Dans nos société tout est possible. En tant qu’humain on est capable du meilleur comme du pire. Nous avons en nous des ressources extraordinaires. On apprend de plein de choses aussi de la vie. J’ai perdu mon père jeune. Ça été hyper difficile et en même temps hyper fécond. Nous sommes tous confrontés à des moments difficiles mais on peut en tirer de la fécondité ou se laisser écraser par cela. Encore une fois, tout le monde n’a pas les mêmes ressorts. Il faut avoir cette humilité, on dépend de plein de choses, des autres, des sous, etc. Moi mon moteur, c’est de ne cesser de me remettre en question pour ne pas passer à côté de ma vie ».

PS : complétez ce témoignage en vous replongeant dans l’interview passionnante qu’Agathe Giros a accordé à  Nicolas Pigasse dans le premier numéro du magazine Les Déviations qui est toujours en vente dans les kiosques ou via ce lien.

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