Stéphanie Maubé : une bergère aux déviations plurielles

Témoignage : Stéphanie Maubé

"Je n'envisageais pas que devenir éleveuse serait un tel combat.  Pas facile aussi d'être une femme dans un monde rural. J'avais l'impression d'être un ovni."

Rien ne prédestinait Stéphanie Maubé, 42 ans, qui a travaillé les six ans premières années de sa vie professionnelle dans le milieu du cinéma et de la communication à devenir bergère ! C’est lors d’un séjour dans la Manche en Normandie qu’elle découvre par hasard l’univers, très particulier des prés salés et des moutons. “Cela a été un électrochoc”.


 Enceinte de son fils, elle quitte Paris pour suivre une formation pendant un an au Lycée agricole de Coutances, un BPREA – Brevet professionnel de responsable d’exploitation agricole-. Elle s’installe à Lessay, une commune de 2 200 habitants connue pour sa foire millénaire, La Sainte-Croix,  l’une des plus fréquentées de France – plus de 350 000 personnes en trois jours !- 


Les débuts sont difficiles. Un premier prêt alors qu’elle n’a pas d’apport financier lui est refusé, son projet n’étant pas jugé assez rentable. Elle parvient à obtenir 50 000 euros, une somme qui l’aide à démarrer et qu’elle mettra huit ans à rembourser. “Cela m’a empêchée de me payer pendant les premières années. Heureusement j’ai eu l’aide du RSA qui m’a permis de tenir et d’élever mon fils.”


 Et Stéphanie de reconnaître : “Je n’envisageais pas que devenir éleveuse serait un tel combat.  Pas facile aussi d’être une femme dans un monde rural. J’avais l’impression d’être un ovni. Je devais sans arrêt me battre.” Mais la bergère des prés salés va vite trouver sa place : en 2020, elle devient maire de Lessay, prend dans la foulée une vice-présidence au sein de son interco et un an plus tard, elle se fait élire  conseillère régionale sur la liste d’Hervé Morin. “J’ai découvert que j’étais engagée et que je ne pouvais plus défendre mon propre confort ou ma qualité de vie.”


 Prise par ses différents mandats, Stéphanie prend la décision de conserver son exploitation et recrute une personne pour l’aider  “à faire tout ce qu’elle ne peut plus assumer.”  Pas question de devenir une élue hors sol qui est déconnectée de la réalité professionnelle. Le monde agricole a besoin d’être défendu. “Cela me permet aussi de ne pas devenir une affreuse politicienne qui pour être réélue, parce qu’elle n’aurait plus rien d’autre dans sa vie, ferait n’importe quoi pour exister.”


 Et de conclure : “Cet engagement politique est une déviation dans ma déviation. Il donne du sens à une vie : se sentir utile au-delà de simplement faire des enfants, gagner sa vie et mener une existence heureuse pour soi. J’ai beaucoup de chance, et oui je suis infiniment épanouie”. Et cela ce voit bien à travers ce reportage tourné dans le bureau de sa mairie.

Reportage-montage : Cédric Ramez / Interview : Nicolas Pigasse

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