Axel Othelet : « Modes de vie minimalistes et réalités de nos territoires »

Les territoires ruraux attirent de plus en plus des citadins en mal de vert. Pour Axel Othelet, sociologue*, ces mouvements se traduisent par des évolutions de socialisation mais aussi par la mise en place de projets écologiques et solidaires. Tous nos territoires n’y sont pas encore adaptés. À l’occasion de la sortie de notre magazine N°2, nous vous proposons de découvrir certaines des histoires que nous avons eu plaisir à raconter. Aujourd’hui nous vous parlerons d’Axel Othelet.

Propos recueillis par Alexandra Luthereau

Les Déviations : Observe-t-on un nouvel attrait pour ces territoires ruraux ? 

Axel Othelet : Lors du premier confinement au printemps 2020, 1,2 million de franciliens ont quitté Paris pour s’installer, pas forcément durablement, dans leurs résidences secondaires ou dans leurs familles. Le phénomène se poursuit. 10% des Français ont un désir de changement de vie. Et en 2020, les transactions immobilières de maisons de campagne ont augmenté de 6,6% selon l’Observatoire de la Safer. 

LD : Tous les territoires sont-ils concernés ?  

AO : Il existe un rural qui gagne et un autre en tension. Celui qui gagne, c’est celui situé autour de Lyon et toute la côte Ouest… Le Sud de la France

marque un peu le pas depuis quelques années à cause du changement climatique, qui est un des enjeux principaux du changement des territoires dans les années à venir. Et d’autres territoires ruraux sont en perdition, comme le Grand Est. Dans son livre “Ceux qui restent”, Benoît Coquard [sociologue à l’Institut national de la recherche agronomique (Inra), ndlr] montre bien la difficulté du territoire à se laisser pénétrer, y compris par des personnes qui y sont originaires, partis ailleurs faire leurs études, et qui à leur retour sont considérés comme des étrangers, des urbains, des “traîtres”. Quand par ailleurs, dans ces territoires, les habitants se sentent comme les oubliés de la République. 

LD : Comment ce désir de changement de vie impacte-t-il  les territoires ruraux ? 

AO : Les personnes qui ont vécu en ville et qui s’installent dans ces territoires peuvent avoir des attentes différentes. Cela correspond à l’histoire un peu caricaturale de l’urbain, gêné par le son des cloches dans un village, qui les fait arrêter. Au-delà de ces processus de socialisation, émergent aussi des questions de modes de vie. Un nombre croissant de personnes, plutôt diplômées, aspirent à s’installer dans des modes de vie minimalistes, dans des espaces communautaires composés de tiny house ou de yourtes tout en souhaitant vouloir avoir accès à des prestations du type espaces de coworking. Force est de constater qu’aujourd’hui nous ne sommes pas adaptés à ces demandes. Ce phénomène nous pousse à s’interroger sur la façon de prendre en considération ces besoins sur les territoires ruraux, car c’est là que ces aménagements seront possibles, pas dans les villes. 

LD : Ces mouvements, ces évolutions sur ces territoires doivent-ils, peuvent-ils contribuer à favoriser la transition écologique selon vous ? 

AO : En général, les personnes qui quittent la ville pour vivre dans les territoires ruraux ne s’installent pas dans des fermes de plusieurs milliers d’hectares. Ils montent plutôt des projets du type bar associatif, épicerie de produits bio et locaux, ciné itinérant ou librairie à vélo… C’est assez diversifié. Globalement, nous sommes sur des initiatives de relocalisation d’activités, de retour au terroir, aux liens et à la proximité. Et effectivement ces projets ont trait à la transition écologique. 

* Axel Othelet ex-directeur de la Cité des paysages en Meurthe-et-Moselle est nouvellement directeur de l’association Alterre Bourgogne-Franche-Comté.

© Pierre BONA

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